L’empoisonnement a toujours été un moyen simple et efficace d’éliminer un adversaire. Il en allait de même durant l’Antiquité où cette pratique était très répandue. Penchons-nous sur l’époque des Grecs et des Romains…
Trois chemins pour la mort
Depuis la nuit des temps, l’Homme a multiplié toutes sortes de conflits de sorte qu’il s’est aussi créé des ennemis. Par la suite, on a commencé à chercher des moyens pour s’en débarrasser. On compte deux méthodes principales: celle du lion (la force) et celle du renard (le piège). Ce sont les rusés qui ont mis au point différents poisons dont l’usage va se multiplier pendant l’Antiquité.
Souvent, on n’imagine pas à quel point l’empoisonnement était courant dans le temps des Grecs et des Romains et ceci pour diverses raisons parmi lesquelles on compte les intrigues politiques par exemple. Des complots se sont multipliés surtout à l’époque romaine. L’empereur Néron appréciait particulièrement éliminer ses proches avec du cyanure. Son prédécesseur Claude a, quant à lui, péri suite à l’ingestion de champignons truqués.
De plus, le poison restait un moyen très courant pour mettre fin à ses jours. Tout le monde connaît l’histoire de Cléopâtre, dernière reine-pharaon d’Égypte qui selon la plupart des historiens se serait laissée mordre par un cobra venimeux. Le suicide était également proposé aux prisonniers condamnés à mort. En effet, généralement, on leur laissait le choix parmi l’épée, la corde ou la ciguë, consommée notamment par Socrate, condamné pour avoir nié les dieux athéniens. De là vient probablement le proverbe “Trois chemins pour la mort”.
Une affaire de femmes
Si le glaive était communément considéré comme une affaire d’hommes, l’empoisonnement en était une des femmes cherchant lâchement à se débarrasser de leur mari pour des raisons purement pécuniaires. Parmi les plus célèbres empoisonneuses de l’Antiquité, on cite Locuste, louée par Agrippine afin de tuer son mari Claude et ainsi permettre à son fils Néron de monter sur le trône. On décrivait ses méthodes comme très ingénieuses. En effet, elle s’intoxiquait elle-même à petites doses de telle sorte qu’ elle est devenue immunisée contre ses poisons.
Ce n’est donc pas par hasard que la déesse des empoisonneuses était de genre féminin, Hécate. Cependant, les Grecs la vénéraient également pour son pouvoir magique. Hécate a eu deux filles tout aussi vicieuses et encore plus populaires: Médée et Circé qui semaient la peur dans le monde antique, tout en gardant leur apparence innocente.
Malheureusement, la société a fini par coller l’étiquette de empoisonneuse à la femme. Ceci a mené à un grand nombre de jugements arbitraires sur des prétendues “sorcières” vers la fin de l’Antiquité, mais aussi au Moyen-Age et même aux Temps Modernes.
Une question d’intention
La frontière entre le poison et le médicament reste toujours floue. Comme exemple, il suffit juste de se servir de l’étymologie du mot grec pharmakon qu’on traduit par “remède” (d’où le nom “pharmacie”) mais aussi par “poison”. Pierre Desproges, célèbre humoriste, l’a très bien remarqué: selon lui, “entre une empoisonneuse et une mauvaise cuisinière, il n’y a qu’une question d’intention”.
On peut illustrer ce propos par l’aconit, fleur mauve montagnarde, employée comme antidote au venin de scorpion, mais également comme moyen d’empoisonner les flèches. Des exemples ainsi sont comptés en dizaines.
En somme, le même principe s’applique aux vaccins d’aujourd’hui qui nous exposent à une petite dose du virus ou de la bactérie afin de nous immuniser contre une dose plus importante. C’est le cas pour la rage par exemple.
Hécate, Médée et Circé incarnent, elles-aussi cette dualité comme on les vénérait pour guérir une grave maladie, mais tout aussi bien pour accomplir sa ruse. Parce que, en soi, c’est la dose qui fait le poison.
Sources:
Sciences & Vie N°92 – Février 2012, pp. 36-39.
Jean-Claude Belfiore, décembre 2009.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_des_poisons#Rome
https://shs.cairn.info/revue-societes-et-representations-2011-2-page-217?lang=fr